Lucas Pouille a laissé planer un doute sur l’avenir de sa carrière suite à sa blessure au tendon d’Achille. Ce pessimisme, d’un joueur pourtant expérimenté, illustre la difficulté pour tout sportif de revenir à haut niveau après une grave blessure. Lucas Pouille pour se donner du baume au cœur pourrait prendre exemple sur des joueurs tels que Paul Henri Mathieu (voir l’excellent reportage sur Canal+, Intérieur sport, Renaissance) ou sur Andy Murray revenu au plus haut niveau après la pose d’une hanche en titane. Ces cas extrêmes illustrent que rien n’est jamais perdu d’avance mais que le retour au haut niveau peut être lourd de sacrifices.
Revenons ici sur ces joueurs de foot dont les blessures ont altéré le cours de leur carrière :
Ceux qui ne se sont jamais remis de blessures
Gourcuff : De potentiel successeur de Zidane à prisonnier de l’infirmerie
« Hypocondriaque », « malade imaginaire » : voilà les sobriquets dont on affubla un joueur pourtant considéré à son prime comme le successeur de Zidane. En début de carrière, Gourcuff n’était pourtant pas un joueur souvent blessé tout a commencé à Lyon. Gourcuff y arrive en tant que recrue phare après deux belles années à Bordeaux. Lyon consent à un investissement non négligeable pour le meneur de jeu français. Mal leur en prit puisque Gourcuff à Lyon c’est un bilan famélique de 90 matchs joués en cinq ans passés sous les couleurs lyonnaises dont seulement 23 joués en entier. Le breton cumulera pas moins de 600 jours à l’infirmerie pour une dizaine de blessures allant du tendon d’Achille, des adducteurs, chevilles, genou ou plus original de l’accident domestique. La suite de sa carrière dans les autres clubs sera plus ou moins du même acabit. Une forme physique qui aura été comme une épée de Damoclès durant quasiment toute sa carrière mais qui reflète certainement un malaise psychologique dans un monde du foot qui ne lui convenait que trop peu.
Abou Diaby : Comment imaginer destin plus cruel pour un sportif que celui d’Abou Diaby ?
Espoir français repéré très vite par Arsène Wenger, Abou Diaby fait rapidement le bonheur d’Arsenal. Un grand avenir lui est promis et tout va soudainement s’obscurcir un 1er mai 2006. Nous sommes à la 90eme minute du match entre Arsenal et Sunderland, c’est le moment choisi par Dan Smith pour commettre l’irréparable : un tacle assassin qui pulvérise la cheville d’Abou Diaby. Les images font froid dans le dos et la cheville à angle droit du Gunner témoigne de la violence du choc. Dès lors, on pourrait faire la liste exhaustive de toutes les blessures de ce joueur hors pair (pas moins de 43). Ici, nous préférons saluer le courage d’un joueur qui n’a eu de cesse de lutter contre les séquelles de ce tacle. Non, Diaby n’était pas un joueur fragile mais seulement il luttait avec une cheville qui n’était plus en capacité de répondre aux exigences du haut niveau. C’est ce qu’explique son ex-coach Arsène Wenger « Il n’est pas fragile. Il a juste été détruit par un mauvais tacle. Le footballeur a besoin de la mobilité de sa cheville. À partir du moment où la mobilité de votre cheville est restreinte, vous compensez par autre chose. Il s’est fait tacler à Sunderland, il y a 6 ou 7 ans. Un tacle assassin qui n’a jamais été puni. Ça a restreint la mobilité de sa cheville.» Beaucoup auraient arrêté après une telle blessure lui s’est accroché à sa passion et à chaque fois il a fait les efforts pour revenir au top niveau. Malheureusement, même avec la meilleure volonté du monde il ne pouvait disposer de la plénitude des moyens physiques.
Shabadi Nonda : Le tacle de José Karl Pierre Fanfan qui fait basculer sa carrière
Révélation de la ligue 1 sous les couleurs de Rennes, S Nonda va avoir l’opportunité de rejoindre l’AS Monaco alors équipe phare du championnat, à l’été 2000. 
S. Nonda y confirmera tous les espoirs placés en lui jusqu’à ce maudit match du 30 août 2003 contre le PSG. On est à la 8ème minute quand sur un contact avec le viril défenseur parisien, José Karl Pierre Fanfan, S.Nonda se tord de douleur. Les images sont impressionnantes, le choc est brutal et la blessure grave. S. Nonda vient de subir une rupture des ligaments du genou gauche. La carrière de l’attaquant congolais prend alors une autre tournure. Il admettra dans une interview pour AS Monaco « n’avoir jamais retrouvé son niveau ». S. Nonda participera tout de même à l’épopée monégasque en ligue des champions et marquera le but du 3-1 face à Chelsea lors de la demi-finale aller. Pas rancunier, Shabadi n’en voudra pas à Pierre Fanfan car « c’est un ancien coéquipier et je sais qu’il a jeu un dur. C’est juste de la malchance, c’est tout. Sur le coup, c’est vrai qu’il est en retard, mais c’est le foot ».
Falcao : le match de coupe de France contre des amateurs qui vire au cauchemar
Toujours à Monaco on pourrait évoquer le destin similaire de Radamel Falcao blessé lors d’un 16ème de finale de coupe de France face à Chasselay. Sur un appel en profondeur dans la surface, le défenseur Soner Ertek viendra prendra la jambe gauche de l’attaquant colombien. Résultat : lésion du ligament croisé antérieur du genou gauche. Le défenseur Chasselay fera l’objet de menace de mort et d’insultes sur internet. Cette blessure deviendra une affaire d’État et une tragédie nationale pour la Colombie. Falcao malgré tous ces efforts ne pourra en effet pas participer à la coupe du monde 2014. Cette grave blessure viendra, tout comme celle de S. Nonda, mettre un frein à une carrière qui aurait pu être encore plus belle qu’elle n’a été.
Ceux qui ont su retrouver le cours normal de leur carrière
Ronaldo : le genou maudit qui le trahira à plusieurs reprises
Rares sont les sportifs aussi connus pour leurs exploits sur le terrain que pour leurs blessures. La carrière du numéro 9 brésilien est malheureusement indissociable de ses trois blessures au genou toutes aussi cruelles les unes que les autres. Quoi de plus dur à voir que ce joueur explosif et vif fauché en pleine accélération lors de cet Lazio-Inter du 12 avril 2000. On y voit alors Ronaldo fixer le défenseur adverse, il entame son passement de jambe, la foule imagine déjà l’adversaire pris de vitesse et Ronaldo conclure l’action par une frappe surpuissante. Hélas, qui aurait pu imaginer ce qui se passe alors : un Ronaldo qui s’effondre dans un cri de douleur sans le moindre contact mais avec un appui qui se dérobe faute à un genou qui lâche. Le stade ne chante plus et les joueurs appellent immédiatement le médecin. L’image est glaçante et on croit sonner le glas de la carrière de la plus grande star du foot. Fort heureusement, le phénix renaîtra de ses cendres et après plus de deux ans d’absence Ronaldo fera un retour tonitruant à la coupe du monde 2022. Il soulèvera le trophée de Jules Rimet et terminera meilleur buteur de la compétition avec 8 buts ce qui lui vaudra un ballon d’or. Ainsi va la carrière de Ronaldo entre ombres et lumières avec ce maudit genou qui fauchera sa carrière plus d’une fois. En effet, le genou de Ronaldo craquera de nouveau en 2008 sous le maillot du Milan AC. Cette fois-ci pas de come-back sous les feux des projecteurs mais un retour au pays pour finir une carrière dont on se demandera toujours ce qu’elle aurait pu être sans ses blessures…
Beckham : deux graves blessures mais la magie du pied droit toujours intacte
Beckham dont nous avons fait un portrait sur ce blog aura été rarement blessé durant sa carrière. Cependant, il connaîtra tout de même deux grosses
blessures la première suite au tacle du joueur argentin Aldo Duscher. Ce qui ne manquera pas de créer la polémique puisque au moment où survient cette blessure nous sommes à quelques semaines de la coupe du monde en Asie. Lorsque Beckham sort du terrain sur un brancard, le doute plane pour savoir si il sera remis à temps pour jouer cette coupe du monde. Beckham dont l’hygiène de vie et le sérieux en dehors du terrain n’a jamais été un sujet de controverses se rétablira à temps pour le tournoi. Il fera des prestations tout à fait honorables mais son parcours avec l’équipe nationale s’arrêtera face au Brésil (futur vainqueur de l’épreuve) en quart de finale. On se souvient que Ronaldinho lui volera la vedette avec un coup franc que Beckham n’aurait pas renié. Quelques années après viendra la seconde blessure grave de sa carrière : une rupture du talon d’Achille de son pied gauche. Beckham évolue en 2010 à Los Angeles mais revient jouer au Milan AC durant la trêve outre atlantique. Il s’insère parfaitement bien dans la formation de C. Ancelotti et joue milieu de terrain droit, ses transversales stratosphériques et ses coups franc défiant l’apesanteur font toujours merveille. Malheureusement, le pied gauche du spice boy va lâcher et plus précisément son talon d’Achille. Certaines mauvaises langues prédisent déjà une fin de carrière pour le joueur alors âgé de 34 ans. Si le milieu anglais arrivera à se rétablir, pour ne mettre finalement un terme à sa carrière quelques années plus tard, cette blessure lui coûtera tout de même sa participation au mondial en Afrique du sud.
Ben Arfa : l’amputation évitée de peu
Ben Arfa c’est le génie incompris par excellence, un talent à la Messi dixit ses partenaires mais aussi un caractère difficilement saisissable. C’est pour cette raison que très vite, après avoir fait Lyon et Marseille, Ben Arfa alla pratiquer son football en Angleterre. A peine arrivé, il fut fauché dans son élan par un tacle assassin de N. De Jong. Après de longues minutes à être soigné sur la pelouse, l’attaquant français sortira sur une civière et avec une aide respiratoire. Le diagnostic tombe rapidement : double fracture tibia-péroné. C’est non sans mal que Hatem Ben Arfa fera son retour sur les pelouses puisqu’il devra repasser sur le billard après avoir contracté staphylocoque doré à l’hôpital de Manchester lors de la première opération. Sans cela, Hatem aurait ne plus jamais rejouer au foot et être dans l’obligation de se faire amputer. Heureusement pour lui et pour les amoureux du foot, cette extrémité fut évitée et Hatem retrouva le haut niveau après plusieurs mois de convalescence.
Ceux qui auraient pu faire encore mieux sans d’innombrables pépins physiques
Robben : Le joueur de cristal
Beaucoup auraient rêvé de la carrière de Robben (tout de même plus de vingt titres majeurs) mais celle-ci aurait encore pu être plus belle sans d’innombrables blessures. En effet, la carrière de Robben a véritablement pris son envol à Munich où il a pu exprimer son talent sur une certaine continuité (encore que..). Cependant, il faut se souvenir de ses débuts à Chelsea et à Madrid où le joueur peinera à convaincre les septiques du fait d’un physique chancelant. Il n’en reste pas moins un joueur qui laissera derrière lui des actions de grande classe. Comment oublier ses accélérations côté gauche ponctué de dribbles vers l’intérieur pour venir conclure dans la lucarne opposée. Son duo avec Ribéry restera dans les annales du football et nombre de ses buts resteront collector.
Neymar : la descente aux enfers du meilleur buteur de la Seleção
Promis au ballon d’or, la carrière de Neymar prendra un mauvais tournant lors de son passage à Paris. Venu dans la capitale parisienne pour ne plus être dans l’ombre de Messi et permettre à Paris de soulever la coupe aux grandes oreilles, Neymar aura malheureusement cumulé les blessures lors des ses années parisiennes. En effet, de 2017 à 2022 Neymar a joué environ 50 % des matchs du PSG.
Il quittera donc le PSG par la petite porte pour aller jouer en Arabie Saoudite où il sera tout autant blessé. Son bilan à Al-Hilal tourne au fiasco : il aura disputé 431 minutes avec le club saoudien en 7 matches, pour 1 but et 2 passes décisives. On vous laisse faire les calculs au prorata de son salaire et de son transfert pour mesurer l’accident industriel que représente son passage au Moyen-Orient. Aujourd’hui de retour dans son club qui l’a vu naître, le FC Santos, on lui souhaite de retrouver le plaisir de jouer et un physique digne d’un joueur de haut niveau.
Ces destins brisés et ces carrières inachevées montrent la cruauté du haut niveau où une blessure peut venir anéantir des années d’effort. Vous caressez votre rêve du bout des doigts et vous en êtes privé du jour au lendemain. Il vous faut alors affronter la solitude de la remise en forme physique loin des partenaires. Vous regardez des tribunes votre équipe gagner sans vous, vos dirigeants recrutent un remplaçant, les supporters vous oublient et les journalistes s’interrogent sur vos blessures. Gageons que les sportifs cités précédemment en auront gagné une force morale qui les aideront dans leur vie future. Et comme chacun sait « ce qui ne te tue pas… »