« David Ginola a commis un crime contre l’équipe » – Gérard Houllier après la défaite contre la Bulgarie en 93

 

France 93 a marqué au fer rouge l’histoire du foot français et comme souvent lorsqu’une équipe perd il faut trouver des boucs-émissaires. Pour Houllier le coupable tout désigné fut Ginola qu’il livra à la vindicte populaire par ses mots : « Le fait qu’un joueur ait craqué, à mon avis, a constitué surement une goutte d’acide importante ; je pense que David Ginola a commis un crime contre l’équipe, je répète, un crime contre l’équipe […] J’ai dit qu’il a commis quelque part un crime contre la cohésion et l’esprit d’équipe. A partir du moment où un joueur ne respecte pas l’esprit du groupe, ne respecte pas la solidarité du groupe, ou la menace, à un moment aussi important que celui-là, je dis c’est grave, c’est tout ». Le fait de match désigné est connu de tous mais rappelons-le une dernière fois pour les plus jeunes de nos lecteurs. L’équipe de France joue sa qualification pour le mondial 94 aux Etats-Unis face à la Bulgarie. Pour ce dernier match de qualification qui se joue au parc des princes, les bleus doivent impérativement faire match nul ou obtenir une victoire. Le score est de 1-1 jusqu’à ce maudit coup franc obtenu à la 90e minute.
L’action est anodine et se situe près du poteau de corner côté droit des bleus. Le coup franc est joué à deux entre Vincent Guérin et David Ginola ce dernier prend la décision et là c’est le drame. L’équipe bulgare remonte tout le terrain jusqu’au but de Kostadinov qui crucifie les bleus et les élimine du mondial 1994. C’est sans doute ce scénario cruel auquel personne ne s’attendait qui poussa G. Houllier à cette déclaration fracassante. Ici, l’idée n’est pas de donner tort ou raison à G. Houllier ou David Ginola mais de montrer combien cette phrase aura suivi chacun des deux protagonistes durant des décennies. David Ginola restera le bouc émissaire de cette élimination dans l’esprit de bien des supporters et s’exilera par la suite outre-Manche. Gérard Houllier rebondira lui aussi de fort belle manière en Angleterre en prenant la tête de Liverpool. Mais de la même façon son image restera entachée par cette déclaration qui certains jugeront injuste envers l’attaquant du PSG. La hache de guerre entre les deux hommes ne sera jamais enterrée et devra même se régler devant les tribunaux. David Ginola intentera un procès à son ancien sélectionneur pour injure publique. Gérard Houllier essaiera de revenir sur ses propos par la suite mais le mal était déjà fait…

Des années après que retenir de cette déclaration ?
Avec le recul plusieurs enseignements et non des moindres peuvent être tirés de cette affaire.
la langue de bois parfois un mal nécessaire : sous le coup d’une défaite on reproche souvent aux joueurs de ne pas se présenter au micro. Ceci-dit, cela est peut-être plus prudent que d’épancher sa colère à chaud au micro des médias. De même, on a souvent reproché à Didier Deschamps sa langue de bois et à Hugo Lloris, alors capitaine de l’équipe de France, ses réponses trop lisses. Or, on voit dans l’affaire Ginola /Houllier combien il eût été profitable que chacun d‘eux soient plus précautionneux dans leur déclaration tant d’avant match que après match. Ce constat est d’autant plus vrai aujourd’hui où à l’ère des réseaux sociaux une déclaration fait le tour du monde se répand telle une traînée de poudre.
la défaite est orpheline et la victoire à mille pères : le football a beau être un sport collectif en cas de défaite l’issue est souvent la même : il faut trouver des responsables. A chaque grande désillusion son coupable : l’arbitre, le sélectionneur, l’attaquant,etc…Qu’importe son poste ou son rôle le bouc-émissaire viendra prendre de plein fouet les frustrations inhérentes à toute défaite. La victoire elle sera partagée collectivement mais la défaite ne peut pas voir sa responsabilité diluer au sein de l’équipe. Et pourtant, l’euro 96 a-t-il été perdu à cause du penalty loupé par Reynald Pedros ? Si la France avait été éliminée par le Paraguay en 1998, Zidane en aurait-il été le responsable lui qui était suspendu pour ce match ? Roger Lemerre doit-il porter seul l’échec de la coupe du monde 2002 ? Les défaites, telles que celle de la France contre la Bulgarie en 93, ne sont-elles pas comme les crashs d’avion qui ont pour raison non pas une seule cause mais sont liés à de multiples facteurs ?
d’« El Magnifico à paria de tout un pays » : cette déclaration, d’à peine une minute en conférence de presse, illustre aussi comment tout peut basculer du jour au lendemain dans une carrière. David Ginola à l’époque c’est le joueur vedette du PSG, celui que l’on surnomme « El Magnifico ». Après ce match et l’accusation publique de son sélectionneur, il deviendra un quasi pestiféré. De même, Gérard Houllier sera plus seulement le technicien réputé qu’il est mais comme l’auteur de cette déclaration incendiaire à l’encontre de son attaquant. Pour les deux, il y aura un avant et un après cette déclaration au point que leurs carrières voire mêmes vies ne seront plus tout à fait les mêmes avant.

Il existe parfois chez le supporter une fascination malsaine pour les clashs ou polémiques au sein du public. Ceci-dit, on ne peut résumer la carrière de ces deux personnalités phares du foot français à ce fâcheux épisode de France Bulgarie et de cette déclaration de Gérard Houllier. Rappelons ici que Gérard Houllier est une idole à Liverpool qu’il a notamment mené au quintuplé tandis que David Ginola a été élu lui meilleur joueur de Premier League en 1999. Alors refermons la page de cette sinistre soirée de 93 et n’oublions pas comme dirait nos amis britanniques que « nobody’s perfect ».

Et vous pensez-vous que la déclaration de Houllier à l’encontre de Ginola était justifiée ? Considérez-vous au contraire que Ginola a été victime d’un acharnement de son sélectionneur ? Dites nous tout dans les commentaires.

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2 réflexions au sujet de “« David Ginola a commis un crime contre l’équipe » – Gérard Houllier après la défaite contre la Bulgarie en 93”

  1. Ginola n’aurait jamais dû tirer ce coup franc au second poteau. Ça n’avait aucun sens à ce moment du match.

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  2. Houllier a vraiment été injuste avec Ginola et aurait dû assumer dignement la défaite plutôt que de s’en prendre à un joueur. C’était clairement cruel de vouloir faire porter le chapeau à Ginola pour cette défaite

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